PORTRAIT : ROSNY ET MATHILDE, UN AMOUR SANS FRONTIÈRE
Il s’appelle Rosny… Elle s’appelle Mathilde… Il est réceptionniste en hôtellerie, elle est artisan fleuriste. Il a 28 ans et elle en a 25… Tous les deux ne forment qu’un. En effet, ce binôme lutte depuis 36 ans contre la drépanocytose. Voici leur histoire…
Originaire du Congo-Brazzaville, Rosny est né le 11 décembre 1986, à Pékin (北京), la capitale de la Chine (中國).
Rosny est le dernier d’une fratrie de 4 enfants. Il est le seul à avoir contracté la drépanocytose homozygote SS, forme la plus sévère.
« J’ai vécu en Chine jusqu’à mes 14 ans. Étant petit, après différentes crises (dont une que j’ai principalement mal vécue car les médecins chinois ne connaissaient pas l’existence de cette maladie, dans les années 90), je me doutais bien que j’avais une maladie assez grave. Seulement, je n’en connaissais pas l’identité. »
À l’époque, la drépanocytose est méconnue en Chine. Pendant 13 ans, Rosny souffre en silence chez lui, avec comme seul traitement du paracétamol et de l’aspirine.
À 14 ans, sa vie bascule. Ses parents ont pris une lourde décision, qui nécessite beaucoup de courage : se séparer de leur petit dernier en l’envoyant en France, chez son oncle, afin qu’il puisse bénéficier des soins adéquats et poursuivre une scolarité quasi-normale.
Ce n’est qu’une fois en France que Rosny a découvert le nom de sa maladie : la drépanocytose (镰状细胞性贫血).
« Lorsque mes premières crises douloureuses se sont manifestées en France, j’ai été dirigé vers l’hôpital de Lagny car j’habitais en Seine-et-Marne. C’est uniquement à ce moment que j’ai appris le nom de ma maladie : la drépanocytose.
J’ai été pris en charge immédiatement par l’équipe de médecins. Ils m’ont expliqué la gravité de la maladie et la façon de la vivre au quotidien (traitements, hydratation, repos). À partir de ce moment, j’ai changé mes activités, freiné mon rythme de vie car j’étais de nature sportive et j’aimais sortir ; ce qui m’a permis de faire moins de crises graves et de prendre réellement conscience de ce qu’impliquait la maladie.
Aujourd’hui, je suis suivi par le professeur Galacteros à l’hôpital Henri Mondor de Créteil. »
En France, les patients drépanocytaires bénéficient d’un suivi médical et d’une prise en charge plus développés qu’en Chine. Rosny a moins de douleurs physiques, notamment au ventre grâce à une ablation de la vésicule biliaire.
Aujourd’hui, il suit un traitement médicamenteux, adapté à sa maladie et ses hospitalisations sont plus ou moins fréquentes :
« Je prends actuellement le Siklos ainsi que la Speciafoldine mais dans le temps, avant de commencer l’Hydréa (car c’était mon traitement avant), j’avais débuté un programme transfusionnel à l’hôpital de Jour du service UMGGR (Unités de Maladies Génétiques et de Globules Rouges) du CHU Henry Mondor. Mais, après seulement quelques semaines dans le programme, j’ai dû être écarté de ce dernier en raison d’une certaine réaction causée par mes anticorps. Aujourd’hui, je ne suis malheureusement plus « transfusable ». Je n’ai pas d’autres solutions que la morphine et les antidouleurs pendant mes crises douloureuses. Les douleurs du quotidien, je les traite avec du Dalfalgant codéiné et des anti-inflammatoires.
Je suis hospitalisé 2 à 3 fois par an, mais, j’ai souvent des douleurs à la maison ; ce qui nécessite beaucoup de repos car cela épuise mon corps et de temps à autre, mon moral. »
Pendant toute son enfance, Rosny grimace de douleur et brave les préjugés de ses camarades. Il est souvent hospitalisé et manque les cours. Il entend souvent que « la drépanocytose est contagieuse » et ne veut pas en parler car il a peur du regard des autres.
Au lycée, en classe de seconde, c’est le déclic. Rosny tombe amoureux de Mathilde, une Française à lunettes, assez discrète. Seulement, il est tétanisé à l’idée de l’aborder et de se mettre à nu. Trois ans se sont écoulés, Rosny se jette enfin à l’eau (ou presque) :
« Au début, j’avais peur de le dire à cause de la réaction de certaines personnes dans le passée qui, ne connaissaient pas la maladie et croyaient que j’étais soit contagieux, soit faible. C’est pour cela que j’appréhendais la réaction de Mathilde. Je voulais qu’elle connaisse d’abord, Rosny avant de connaître ma maladie. Ce n’est qu’une fois hospitalisé que j’ai dû lui annoncer que j’étais drépanocytaire. Cela n’a pas été facile car j’ai toujours eu du mal à en parler, mais j’ai vu que cela ne changeait rien à notre amour et j’étais rassuré. »
De son côté, Mathilde n’avait jamais entendu parler de la drépanocytose avant de rencontrer sa moitié.
« Je savais avec les rumeurs au lycée que Rosny avait un problème de santé mais j’ignorais ce que c’était. Nous étions déjà amis depuis 3 ans lorsque nous nous sommes mis en couple, mais il ne me parlait pas de ce côté-là de sa vie, donc je respectais son jardin secret. Quand nous sommes sortis ensemble, il a été hospitalisé au bout d’un mois. Je me suis rendue à l’hôpital après les cours et il m’a annoncé qu’il souffrait de la drépanocytose. Je ne connaissais pas la maladie : je suis allée sur Google en rentrant à la maison et j’ai fait des recherches car j’ai tout de suite voulu être un partenaire pour lui dans la lutte contre la maladie. J’ai immédiatement accepté la maladie, je ne me suis pas posée de questions sur notre couple. Je savais qu’il était l’homme de ma vie dès les premiers jours, peu importe les épreuves. »
Depuis mars 2007, Rosny et Mathilde sont inséparables et filent le « parfait » amour. Et depuis mars 2008, ils vivent ensemble « comme un couple tout à fait ordinaire sauf pendant les épisodes douloureux ».
Pour Mathilde : « La grosse difficulté, c’est de le voir souffrir quand il a très mal. Ce n’est pas facile surtout que Rosny est de nature assez fière et qu’il essaie de prendre souvent sur lui. Mais, quand je vois cette souffrance que je ne peux pas imaginer, cela me fait mal !
Nous avons également eu la chance d’avoir notre appartement quand il travaillait car il faut savoir que l’AAH (Allocation pour Adultes Handicapés) n’est pas reconnue par les agences immobilières pour la location d’appartements. Il faut donc être patient quand on n’a ni garants, ni gros revenus. »
En ce qui concerne Rosny : « Les difficultés, je les rencontre plutôt dans ma vie personnelle. J’ai été obligé d’arrêter de travailler après une grosse crise, un syndrome thoracique dû au rythme de travail malgré des patrons assez compréhensifs. »
Malgré les inconvénients liés à la maladie, le couple reste fort et uni. Ils envisagent, tous les deux, de fonder une famille. Le couple a pris ses précautions : Mathilde a décidé de se faire dépister.
« Je me suis faite dépister car nous voulons avoir un enfant. Je suis AA et Rosny SS. Nous savons que nos enfants seront eux, porteurs, mais, ils ne seront pas malades. Etant donné que le traitement par Hydréa, puis par Siklos, empêche d’avoir un enfant en limitant les spermatozoïdes, nous avons fait une démarche pour une Fécondation In Vitro et nous sommes impatients d’accueillir un jour le fruit de notre amour. »
En attendant, ils empêchent la maladie de prendre le dessus et d’empiéter sur leur vie privée.
« Il est vrai que la drépanocytose est une maladie qui peut prendre beaucoup de place dans un couple due à ces différents inconvénients. Mais, pour ma part, en travaillant sur ces difficultés (prendre son traitement sérieusement, faire attention à son hygiène de vie, etc..), on peut réussir à trouver un équilibre et par ce fait, rendre la drépanocytose presque secondaire. Car oui, la maladie fait partie de notre vie de couple mais elle n’y fait pas la loi. »
Rosny est resté longtemps dans le déni. Pendant des années, il ne s’est pas confié et s’est rarement dévoilé. Aujourd’hui, son couple c’est sa force. Avec l’aide de Mathilde, il se sent plus léger. La drépanocytose n’est quasiment plus un fardeau.
Il envisage même de retourner en Chine pour présenter sa bien-aimée à ses parents.
Quant à Mathilde, elle s’est endurcie au fil du temps. Tous les jours, elle prend son courage à deux mains, soutient son conjoint et en apprend un peu plus sur la maladie.
« Pour ma part, j’ai appris grâce à Rosny et sa maladie, à relativiser les problèmes du quotidien et à ne pas se laisser déborder. Chaque chose en son temps. Il faut surtout selon moi, apprendre à connaître la maladie (les signes annonciateurs de crises douloureuses ou de grosses fatigues) pour pouvoir la contrôler au quotidien. Et surtout, profiter d’être en couple et amoureux est le plus important, à mes yeux. »
L’Amour, avec un grand « A » est leur seule Arme pour Affronter la drépanocytose.
Ensemble, ILS sont plus forts ! Ensemble, NOUS sommes plus forts ! La drépanocytose, ça n’arrive pas qu’aux autres, alors « faites-vous dépister ! ».
La drépanocytose, notre combat !
Crédits
Ambassadeurs : Rosny et Mathilde
Photos : T?M
Réalisation : Mandy F.
Bonjour Rosny,
J’ai lu avec émotion ton histoire, je tiens à t’encourager dans ton combat, je suis moi-même maman de deux garçons drépanocytaires de 16 et 14 ans et nous vivons à Bruxelles. Je suis tous les jours à la recherche de personnes avec qui je peux partager nos luttes face à cette maladie.
Je vous souhaite beaucoup de bonheur.
Nathalie
Bonsoir,
Je viens de lire votre témoignage cela me touche tellement j’ai l’impression de voir une partie de notre histoire, mon compagnon est drepa SS également âgé de 24 ans et moi de 20ans je cherche des personnes avec qui en discuter, apprendre, pour lui rendre la vie encore meilleure.
Courage à vous tous, il faut ce battre, ensemble face à cette maladie.
Foss à vous
Alexandra
Bonjours je me suis vue dans ton histoire car je suis moi même drepa ss et maman d’un petit garçon qui on souffre. J’espere qu’un jour il pourras trouver un remède pour cette maladie qui nous fait au temps souffrir mais on ne le laisserais pas gagner bon courage à tous